Sommaire

  • Pourquoi un Livre vert?
  • Un peu d’histoire
  • État de situation
  • Orientations proposées
  • Conclusion
  • Rapport de consultation et recommandations

    Le rapport de consultation est disponible:

  • Rapport de consultation
  • Téléchargez le Livre vert

    Version PDF : Livre vert - version PDF

    Ce Livre vert est publié par l'Union des travailleurs et tra­vailleuses accidenté-e-s de Montréal. Pour nous contacter : Contact

    « L'économie qui prétendrait

    encore faire passer l'homme

    après les machines serait

    vouée à l'échec »

    René Lévesque

    Pourquoi un Livre vert?


    Il y a près de cinq ans, le gouvernement du Québec lançait une démarche visant à réformer le régime de santé et de sécurité du travail. Combien de citoyennes et de citoyens au Québec ont entendu parler des travaux sur cette importante question et, surtout, combien d’entre elles et eux ont pu donner leur opinion sur les améliorations à apporter à ces régimes? À part quelques privilégiés, bien peu de personnes ont eu l’occasion de s’exprimer sur la question.

    Cette démarche débute officiellement le 7 mai 2009 lorsque le ministre du Travail de l’époque, David Whissell, annonce le lancement de travaux visant à réformer les régimes de prévention et de réparation des lésions professionnelles.

    Un groupe de travail composé de trois représentants syndicaux, de trois représentants patronaux et d’un président « neutre », Viateur Camiré (ancien vice-président d’Abitibi-Bowater), est alors mis sur pied afin de recommander des changements législatifs. Monsieur Camiré n’a pas jugé bon de tenir des audiences publiques même s’il pouvait le faire. Malgré l’absence de consensus au sein du groupe, le président dépose son rapport à la CSST le 15 décembre 2010. Des 32 recommandations faites par M. Camiré, on peut facilement en identifier 28 qui reprennent en tout ou en partie des positions patronales.

    Sur la base de discussions fondées sur ce rapport, la CSST adopte le 22 septembre 2011, sans consultation publique, son projet de réforme contenu dans le document « La modernisation du régime de santé et sécurité du travail ». Très largement inspiré du rapport Camiré, il contient 30 recommandations de modification des régimes de prévention et de réparation des lésions professionnelles.

    Le 3 avril 2012, toujours sans avoir tenu de consultation publique, la ministre du Travail en poste, Lise Thériault, dépose le projet de loi n° 60 sur la modernisation du régime de santé et sécurité du travail. Ce projet de loi, principalement fondé sur les recommandations de la CSST et du rapport Camiré, est mort au feuilleton de l’Assemblée nationale suite au déclenchement des élections en août 2012. L’élection d’un gouvernement minoritaire du Parti québécois sonne le glas du projet de loi.

    Toutefois, la nouvelle ministre du Travail, Agnès Maltais, déclare en commission parlementaire le 4 février 2013 son intention de poursuivre la démarche entreprise par le gouvernement libéral. Elle demande alors au conseil d’administration de la CSST de lui faire des recommandations sur la base du « consensus » contenu dans son document du 22 septembre 2011.

    Le 5 novembre 2013, lors de l'ouverture du Grand rendez-vous santé sécurité du travail, la ministre Maltais doit publiquement avouer que le « consensus » n'existe plus et qu'il n'y a pas d'entente entre les parties syndicale et patronale siégeant au conseil d'administration de la CSST. Encore une fois, plutôt que de consulter largement les Québécoises et les Québécois, elle annonce la formation d'un nouveau comité conjoint, composé cette fois de membres du ministère du Travail et de la CSST, afin de lui faire des recommandations sur une éventuelle réforme.

    À nouveau, on affirme donc qu'on décidera de ce qu'il y a de mieux pour les travailleuses et les travailleurs... mais derrière des portes closes, à l'abris des oreilles indiscrètes. Autre gouvernement, mêmes orientations et stratégies...

    Compte tenu de l’importance que revêt ce projet de réforme pour la société québécoise, nous pensons qu’il revient à l’ensemble de la société, et particulièrement aux travailleuses et travailleurs, de s’exprimer sur le sujet. N’est-ce pas d’ailleurs ce que le gouvernement du Québec avait fait avant de procéder à la réforme des régimes de prévention et de réparation des lésions professionnelles à la fin des années 1970?

    En effet, en 1978, le gouvernement du Québec initiait une vaste consultation populaire avec la publication de son Livre blanc sur la santé et la sécurité au travail. Que l’on soit d’accord ou non avec toutes ou chacune des modifications législatives qui en ont découlé, il n’en demeure pas moins que ce Livre blanc a permis la tenue d’un véritable débat public dans la société québécoise.

    Ce Livre blanc, qui énonçait les orientations du gouvernement, s’ouvrait sur une citation de René Lévesque : «L'économie qui prétendrait encore faire passer l'homme après les machines serait vouée à l'échec». On doit malheureusement constater, 35 ans plus tard, que son gouvernement et tous ceux qui lui ont succédé ont failli à la tâche. En effet, bien qu’aujourd’hui l’économie « prétende » inlassablement faire passer l’humain avant la machine, cette prétention se voit contredite de façon irréfutable par l’épreuve brutale des faits : quotidiennement, des centaines de travailleuses et de travailleurs sont encore blessés, mutilés ou empoisonnés dans leur milieu de travail.

    Et ces « machines », dont René Lévesque parlait, ne sont plus seulement que matérielles : les employeurs et la CSST ont depuis mis sur pied d’immenses machines de gestion et de contestation qui broient des travailleuses et des travailleurs qui ont eu le malheur d’être victime de leur travail, machines qui font souvent autant de ravages que les accidents et les maladies du travail eux-mêmes.

    Encore aujourd'hui, la société québécoise est confrontée quotidiennement à cet échec : le temps n'est-il pas venu d'en reparler? N'est-il pas temps d'examiner le sort qu'on réserve à ces femmes et à ces hommes victimes de cette économie? Peut-on refuser de voir plus longtemps ce qu’il est advenu de leur vie et de celle de leur famille?

    Bien qu’il soit manifeste que le gouvernement du Québec ne souhaite pas refaire le même type de consultation dans le cadre de sa démarche actuelle, nous pensons qu’une large réflexion publique s’impose. C’est pourquoi nous publions ce Livre vert. En effet, un Livre vert vise à ouvrir une large discussion sur un problème d’intérêt public dont les répercussions sociales sont importantes et à proposer des mesures législatives qui pourraient être prises pour le résoudre.

    Les orientations proposées dans ce Livre vert sont principalement fondées sur notre expérience quotidienne avec les travailleuses et les travailleurs victimes d’un accident ou d’une maladie du travail depuis 1975. Il ne reprend pas chacune des positions que nous avons pu développer au cours des ans; il s’attarde plutôt aux grands principes qui devraient guider la réparation des lésions professionnelles. Nous avons également jugé opportun d’inclure des orientations proposées par d’autres organisations, sur lesquelles nous n’avons pas nécessairement de position, parce qu’elles peuvent contribuer selon nous au débat. Enfin, le monde du travail, les conditions de travail et les problèmes qui en découlent se modifiant sans cesse, nous avons aussi intégré certaines nouveautés sur lesquelles personne n’a eu, à notre connaissance, à se prononcer jusqu’ici.

    L’importance des enjeux pour toutes les Québécoises et tous les Québécois, et particulièrement pour les travailleuses et les travailleurs, nous impose d’assurer la plus vaste diffusion possible à ce Livre vert. Suivra une consultation pendant laquelle les citoyennes et citoyens pourront s’exprimer sur les orientations proposées, puis le dépôt de recommandations au gouvernement du Québec l’été prochain afin de lui permettre de proposer à la population québécoise une réforme en profondeur de notre régime de réparation des lésions professionnelles avant la fin de l’année 2014.

    Souhaitons-nous collectivement de bons débats afin de cheminer vers un peu plus d'humanité et de justice, vers une pleine réparation des lésions professionnelles...

    Le conseil d’administration de l’uttam